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A Taïwan, la crainte du rattachement à la Chine

Pour la première fois depuis l’élection de la présidente Tsai Ing-wen, en mai 2016, un dignitaire chinois de haut rang se rend sur l’île. Il participe à un forum sur les échanges entre municipalités, le 22 août 2016. Une visite qui ravive des craintes du rattachement de Taïwan à la Chine continentale.
Article rédigé par Marc Taubert
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 2 min
Ils étaient des dizaines à protester contre la venue d'un dignitaire chinois, le 22 août 2016, à Taipei, la capitale taïwanaise. Dans le pays, ils sont nombreux à craindre la montée en puissance et les velléités du grand voisin continental. (SAM YEH / AFP)

La venue de Sha Hailin, membre du comité du Parti communiste de Shanghaï, avait été bien préparée. Des dizaines de manifestants avaient été tenus à l’écart de l’aéroport de Taipei. Pourtant, l’un d’eux a réussi à franchir le cordon de police et a crié à son passage: «Sha Hailin, va-t-en!»
 
Ce militant est évacué par la police, le 22 août 2016, après avoir crié «Sha, va-t-en!» Les Taïwanais sont en effet très partagés quant au rapprochement avec la Chine. (SAM YEH / AFP)

Car les relations entre les deux Chine restent très tendues. Depuis 1949, l’île possède son propre gouvernement, sans pour autant jamais avoir déclaré son indépendance. Son nom officiel est d’ailleurs «République de Chine». Et pour Pékin, Taïwan fait partie de son territoire.
 
Craintes de rattachement à la Chine
L’un des principaux enjeux pour Pékin est la reconnaissance par la nouvelle présidente taïwanaise du «consensus de 1992». Cet accord initié par l’ancien parti au pouvoir, le KMT (longtemps parti unique sur l’île), avec le Parti Communiste Chinois (PCC), autour de l’idée d’une seule Chine, a rapproché les deux ennemis. «Chacun avec sa propre interprétation», selon Le Monde.
 
Mais la nouvelle présidente, Tsai Ing-wen, est issue du Parti progressiste démocratique (DPP), parti qui défend une vision indépendantiste de Taïwan. Cette dernière se refuse pour l’instant à reconnaître le «consensus de 1992». Pékin réagissait ainsi après son discours d’intronisation à la présidence : Tsai Ing-wen n’a pas «proposé une manière concrète d’assurer le développement stable et pacifique des relations entre les deux rivages».
 
Ce sujet reste très sensible sur l’île, et les dirigeants gardent en mémoire la «révolte des tournesols». En mars 2014, plusieurs centaines de milliers de personnes avaient défilé dans les rues de Taipei pour dénoncer un pacte de libre-échange avec la Chine craignant un renforcement de son contrôle sur Taïwan.
 
En mars 2014, des centaines de milliers de personnes sont descendues dans les rues de Taïwan pour prostester contre un accord de libre-échange avec la Chine. Elles redoutaient la mainmise du voisin continental sur l'île. (MANDY CHENG / AFP)

Isolation internationale
Cette petite Chine fait face à la stratégie de son voisin puissant qui, prétextant l’existence d’une seule nation, l’isole peu à peu. Seuls 23 Etats reconnaissent actuellement Taïwan. Un chiffre qui devrait encore diminuer.
 
La bataille se joue surtout en Afrique, où l’Empire du milieu est monté en puissance depuis plusieurs décennies. «Entre 1994 et 2013, treize Etats ont fait la bascule de Taïwan vers la Chine continentale avec à la base le travail des services secrets chinois. Ensuite, ce sont les diplomates qui ont pris le relais. Beaucoup d’argent a été distribué. La plus grande victoire des services chinois, c’est le Sénégal en 2005», explique Gérarld Arboit, du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R), cité par Le Monde Afrique.
 
Les rares pays qui soutiennent encore officiellement la «République de Chine» sont de plus en plus des micro-Etats, comme la République de Nauru, île de 10.000 habitants, tristement connue pour son camp de réfugiés renfloués d’Australie.
 
Pour tenter de préserver des relations avec d’autres Etats, Taïwan conserve des «Bureau de représentation». En clair, des ambassades non-reconnues comme telles. Désormais, le pays mise sur son économie pour préserver sa fragile indépendance.
 
La population, dans sa majorité, rejette un rattachement avec leur grand voisin. Début 2016, 59% des personnes interrogées se disaient Taïwanaises contre 33% comme étant des «Chinois taïwanais». Ils étaient 48% à se reconnaître en tant que «Chinois taïwanais» en 2004.

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