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Maroc: le dirham commence à flotter... et alors?

Le Maroc est passé le 15 janvier 2018 à un régime de change flexible. La parité du dirham peut désormais fluctuer à l’intérieur d’une bande de ±2,5%. Le royaume peut y gagner en compétitivité, mais cela risque d'augmenter le coût des marchandises importées. Pour leurs transferts d'argent, les Marocains devront choisir le moment opportun en tenant compte des fluctuations du dirham.
Article rédigé par Michel Lachkar
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 2 min

 
Le nouveau régime de change du dirham, plus flexible, est entré en vigueur le 15 janvier. Afin d'éviter toute spéculation, le ministère de l’Economie a annoncé ce changement majeur pour le pays, via un simple communiqué. Avant l’entrée en vigueur de la flexibilité du dirham, sa valeur était fixée à 40% sur le dollar et à 60% sur l’euro. Le passage à un système de change flottant, libère le dirham du lien avec ces deux devises et le soumet au système incertain de l’offre et de la demande.

Fin de la parité fixe
Selon la Banque centrale marocaine, «la parité fixe devenait de moins en moins compatible avec l’internationalisation de l’économie marocaine». Le FMI, qui encourage cette réforme, note que les salaires marocains augmentent plus rapidement que la productivité du travail. «En conséquence, l’avantage du coût salarial marocain pourrait ne pas se prolonger dans un contexte de stabilité du dirham.» 

L’enjeu est triple pour le Maroc: résorber une balance des paiements structurellement déficitaire, développer le secteur financier et attirer les investisseurs étrangers, en particulier chinois.
La Chine devient un partenaire de premier plan du Maroc. Les importations chinoises représentaient il y a dix ans 5% des importations marocaines contre 10% aujourd’hui. En évitant toute surévaluation du dirham, le Maroc permettra à son partenaire chinois de rapatrier plus facilement ses dividendes.

Autre atout du Maroc, la bonne santé affichée de son système financier. Les grandes banques marocaines sont dans une phase expansive en Afrique. Elles prennent des positions au Tchad, en Egypte, au Ghana ou encore au Rwanda. La plus grande mobilité des capitaux autorisée par la fluctuation du dirham permettra d’accélérer ce développement à l’international des principales banques du royaume.

Le contre-exemple égyptien
Certains appréhendent toutefois une dépréciation du dirham, avec à la clef une augmentation des coûts des importations, notamment des produits énergétiques. Dépourvu de réserves en hydrocarbures, le Maroc doit en effet importer massivement pour répondre à sa demande intérieure. La balance commerciale du royaume reste, elle, structurellement déficitaire. Les exportations marocaines sont essentiellement composées de produits agricoles, de phosphates et dérivés, de textiles et cuirs. L'automobile, l’électronique et l’aéronautique, des secteurs à plus haute valeur ajoutée, représentent encore une part marginale. Le Maroc bénéficie également des transferts des Marocains vivant à l’étranger, des revenus touristiques et des investissements directs étrangers.

Selon l’économiste Medhi Lahlou, «les importations risquent de se faire à un coût plus élevé, qui sera nécessairement répercuté sur le marché intérieur (...). Le pouvoir d'achat de la classe moyenne et des catégories les plus vulnérables en sera fortement affecté.»

L'exemple de l'Egypte, où le passage à un régime de change flottant a été suivi d'une dévaluation de sa monnaie et d'une inflation record, reste dans tous les esprits. Mais pour les autorités monétaires du royaume chérifien, la réforme a été élaborée de façon «volontaire», contrairement à l'Egypte qui était dans une situation de «crise de change». Surtout la Banque centrale marocaine continuera d’intervenir massivement et la libéralisation complète du dirham devrait s'étaler sur une dizaine d'années.

Transferts d'argent
Première conséquence immédiate, les Marocains de l’extérieur devront suivre de près les taux de changes du dirham. La valeur des transferts d'argents vers le Maroc évolueront désormais suivant ses fluctuations.

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