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Tunisie: le tourisme va (un peu) mieux

Les chiffres semblent montrer une embellie du tourisme en Tunisie. Selon des chiffres de l’Office national tunisien du tourisme, cités par l’agence Ecofin, le nombre de visiteurs a augmenté de 46,2% pour la période de janvier à mai 2017 pour atteindre 1,52 million de personnes. Une hausse en grande partie due à l’arrivée de touristes maghrébins. Et qui cache de grosses disparités.
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Touristes sur une plage de Djerba (sud de la Tunisie), le 7 septembre 2016. (REUTERS - Zoubeir Souissi)

Sinistré par les attentats de 2015, le tourisme est une activité essentielle pour la Tunisie: il représente entre 7 et 10% de son PIB (certains parlent même de 20% !). Et emploie environ 14% de sa population active.  

L’amélioration des résultats est donc une bonne nouvelle pour le pays. Mais les chiffres montrent que l’embellie constatée pour les cinq premiers mois de 2017 est d’abord due aux voisins de la Tunisie: 1,14 million de visiteurs maghrébins s’y sont ainsi rendus depuis le début de l’année. Parmi eux, on compte près de 630.000 Algériens. Les autres nationalités ne sont pas précisées.

De janvier à mai 2017, «les arrivées de touristes européens n’ont représenté que 17% des arrivées totales de janvier à mai, plombées par les restrictions sur les voyages en Tunisie, mises en place» à la suite des attentats djihadistes, constate Ecofin. En 2014, 720.000 Français avaient franchi la Méditerranée. Ils n’étaient plus que 400.000 en 2016. Deux chiffres qui en disent long sur les difficultés de l’activité touristique… A comparer avec les 1,4 million de visiteurs venus de l’Hexagone avant la révolution de 2011!

L’absence des Occidentaux est également partiellement compensée par les Russes. Ceux-ci «ont déserté la Turquie suite aux tensions entre Ankara et Moscou. Ils se sont repliés sur la Tunisie. Une grande partie de cette clientèle recherche le soleil et la plage à des prix bas», explique Jean-Yves Moisseron, économiste à l’Institut de recherche pour le développement cité sur le site de TV5.

Dumping ou montée en gamme?
Prix bas, ou prix cassés? Le Huffington Post cite ainsi l’exemple d’une famille française de trois personnes qui «a payé 950 euros en pension complète, et billets d’avion compris» pour venir en Tunisie (la durée n’est pas précisée). Reste à savoir si dans ce contexte, la rentabilité est au rendez-vous pour les professionnels. Lesquels, dans le même temps, doivent continuer à payer leurs frais fixes: salaires, charges d’amortissement et d’entretien, taxes… Une véritable spirale infernale qui risque d’entraîner faillite sur faillite.

Touristes devant une mosaïque romaine au musée du Bardo à Tunis le 18 mai 2017. (Sipa - Xinhua - Adele Ezzine)

Dans ce contexte, comme l’expliquait Géopolis dès 2015, le malaise du tourisme tunisien n’est pas uniquement lié aux attentats. Globalement, la situation est liée au choix du tourisme balnéaire de masse fait il y a plusieurs décennies. Alors que «les prestations en termes de service et d’hébergement restent encore très médiocres», estime Jean-Yves Moisseron. Dans ce contexte, si les amateurs de soleil et de baignade ne viennent plus, tout s’effondre.

Pour le spécialiste, «le secteur touristique tunisien doit monter en gamme» et se diversifier pour faire revenir des clientèles européennes à fort pouvoir d’achat. Le moyen de faire revenir les devises dont le pays a besoin.

Et la sécurité dans tout ça?
Il s’agit ainsi d’orienter le pays vers un tourisme local et de niche, plus axé sur la culture et le patrimoine. La Tunisie possède des «milliers de suites historiques et archéologiques», rappelle le site marocain leconomiste.com. Par ailleurs, «elle est classée parmi les meilleures destinations au monde en thalassothérapie. Près de 60 centres sont répartis sur tout le territoire», ajoute cette source.

Reste qu’au-delà, l’aspect sécuritaire reste pour l’instant le plus important. Les autorités tunisiennes ont renforcé les mesures de sécurité pour rassurer les touristes: présence policière, détecteurs de métaux, fouilles… Des mesures qui semblent avoir convaincu des pays comme la Belgique d’assouplir les avis de voyage pour ses visiteurs. Ce que n’a pas fait encore fait la Grande-Bretagne, qui a perdu 30 ressortissants (sur 38 victimes) lors de l’attentat de Sousse en juin 2015. Au cours d’une visite-éclair à Tunis le 3 mai 2017, le ministre des Affaires étrangères britannique, Boris Johnson, a promis une révision des avertissements de voyage. Mais pour l’instant, le Foreign Office continue de déconseiller «tous les voyages à l’exception des déplacements indispensables». Quant au Quai d’Orsay, il appelle les ressortissants français «à faire preuve de vigilance renforcée»

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