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Une immolation nourrit la contestation en Bulgarie

L'immolation par le feu, le 20 février 2013, de Plamen Goranov, 36 ans, est le signe de l'aggravation du mouvement de protestation contre la vie chère. Les manifestations qui secouent le pays depuis janvier ont également pour objectif de dénoncer la corruption qui règne dans le pays.
Article rédigé par Jean-Claude Rongeras
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Une photo de Plamen Goranov, Bulgare qui s'est immolé par le feu, placardée sur un arbre à Varna, le 5 mars 2013. ( AFP/NIKOLAY DOYCHINOV )

Gravement blessé lors son acte désespéré, Plamen Goranov, a finalement succombé à ses blessures, le 4 mars. L’hôpital de Varna, où il était soigné, n’a pas annoncé immédiatement sa mort pour que les manifestants, réunis à Sofia, n’amplifient leur mouvement. 
 
Le mécontentement contre le pouvoir a démarré par une mobilisation contre l’augmentation des factures d’électricité en janvier, qui ont provoqué, le 20 février, la démission du Premier ministre conservateur Boiko Borissov. «Le peuple nous a donné le pouvoir, aujourd’hui nous lui redonnons pour éviter une effusion de sang», a affirmé le charismatique leader, indiquant «avoir tout fait pour satisfaire les protestataires». Le leader a certainement les yeux rivés sur les élections de mai 2013, dont la date a été avancée en raison de son retrait. Mais le geste n’a pas suffit à calmer la population en colère.

Tout le secteur de l’énergie est en effervescence
Plus de 1.500 mineurs ont manifesté le 4 mars à Sofia pour leur emploi, alors que les centrales au charbon pourraient subir des arrêts temporaires, en raison notamment de la faiblesse de la consommation d’électricité dans le pays. «Nous sommes ici pour défendre nos emplois. Nous voulons du travail ! Nous voulons du pain pour nos enfants !», a déclaré au cours du défilé le dirigeant du syndicat Podkrepa, Vladimir Topalov.
 
Près de 1.500 travailleurs de la société publique des chemins de fer pourraient également être touchés par les suppressions d’emploi.


2e cause du mouvement, la corruption des politiques par les milieux d’affaires
A Varna, où les manifestations sont quotidiennes depuis plus de trois semaines, les protestataires mettent en cause le groupe TIM, fondé dans les années 90 par d’anciens militaires. La société en question possède des intérêts dans de nombreux domaines et assèche le marché de l’emploi au détriment des PME, selon les manifestants qui ont réclamé la démission du maire de Varna, Kiril Iordanov. L’homme, socialiste puis conservateur, en place depuis 14 ans, est accusé d’avoir des relations troubles avec de nombreux hommes d’affaires. Il a fini par céder sous la pression, le 6 mars  2013.

Cette démission a été applaudie par des centaines d’habitants de cette ville des bords de la mer Noire qui scandaient «Mafia» et «Kiro (Kiril) en prison».
 
Goranov, héros de la contestation
La presse locale avait annoncé trois nouveaux suicides par pendaison la veille, alors que le 4 mars deux hommes s'étaient déjà donné la mort en sautant d'un pont dans la mer. Les cas d’immolation par le feu sont également en train de se répandre : deux nouvelles personnes ont également tenté de se tuer de cette manière. L’un est décédé, le second, âgé de 53 ans, père de cinq enfants, a été grièvement blessé.

Plamen Goranov est considéré par les médias bulgares comme un Ian Palach national. L’église orthodoxe, qui condamne le suicide d'une manière générale, a autorisé l‘enterrement religieux de celui qui est décrit par des proches comme «un artiste excentrique», pionner de la révolte. Pour son oncle, «Plamen était une âme pure. Il croyait que le monde pouvait être changé.» 

Un observateur estime qu’il «est devenu le symbole national révélant que la démocratie en Bulgarie, contrôlée par une oligarchie post-communiste, est réduite aux  apparences»
 
Pour autant, les analystes pensent que les protestataires n’offrent pas un catalogue de revendications cohérentes et n’ont pas de programme sérieux.

Quant aux partis politiques, ils offrent peu d’espoir pour changer la donne. Boiko Borissov, apparaît bien implanté, malgré sa démission. L'opposition, en l'ocurrence le parti socialiste bulgare, peine à convaincre. Meglena Kuneva, ancienne commissaire européenne, qui a créé un parti de centre-droit pro-européen, est la seule nouveauté.  

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